Dans la foulée du fameux rapport sur le soi-disant entrisme des Frères Musulmans qui n'existe pas mais dont les médias ont fait leurs choux gras et pour lequel Macron a cru bon de réunir un conseil de défense qui a fait plus de fumée que le feu qu'il a prétendu éteindre, une certaine Laure Miller, précisément de son propre sale parti de plus en plus confusionniste, s'est crue autoriser à publier une tribune dans... La Croix, comme par hasard :
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En observant sur les réseaux sociaux l'émotion que ce texte a soulevé, je me suis néanmoins gardé de tout à priori, tant cela semblait énorme, et j'ai tenu à dépasser le seuil du titre pour aller voir plus avant ce dont il s'agissait, on ne sait jamais. Il convient en effet de se montrer prudent en cette époque troublée où l'émotion est davantage reine que la réflexion et l'investigation plus poussée, armé de mon esprit critique. Forgeons nous donc une opinion éclairée sur le sujet dont il s'agit.
Madame Miller a dans le viseur, en fait, une certaine manière de transmettre des langues étrangères. Il s'agit du dispositif dit EILE, pour Enseignements Internationaux de Langue Etrangère.
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Selon elle (je n'ai pas vérifié), l'enseignement de l'arabe dans le cadre de ces EILE est majoritaire à 80 %. Nous y voilà. On ne cible pas ici l'anglais ou le japonais. L'arabe, voilà l'ennemi.
Si l'on s'écarte un peu de cette problématique sclérosée à ce seul dispositif, d'autant plus qu'il ne concerne que les seuls volontaires, et que l'on pose plus largement le débat de l'enseignement des langues, il y a de quoi en écrire comme en penser des tartines...
En France, les langues les plus enseignées sont, par ordre décroissant, l’anglais, l’espagnol, les langues les plus hégémoniques à près de 80 % pour l'anglais, après lesquelles viennent en moindre importance l’allemand, l’italien, le chinois et le japonais.
Pourtant, par ordre d'importance, les langues les plus pratiquées en France en dehors du français, selon l'INED, sont l'arabe dialectal (3 ou 4 millions de locuteurs), les créoles et le berbère (près de deux millions), l'alsacien (548 000), l'occitan (526 000), le breton (304 000), les langues d'oïl (204 000) ... (source)
Il y a donc un certain paradoxe à observer que les langues les plus enseignées ne sont pas les plus parlées dans notre pays, et que l'arabe en est considérablement absent. Et cela m'insupporte. je ne peux m'empêcher d'y voir une forme de racisme et de xénophobie.
Pour ma part, soucieux de pouvoir dialoguer dans les quartiers dans lesquels je vis avec qui bon me semble, j'ai voulu me familiariser plus avant avec cet arabe le plus souvent dialectal qui se parle ici et là, et me suis donc renseigné sur les endroits où l'on pouvait l'apprendre. J'habitais alors en Meurthe et Moselle, à Toul, et la seule possibilité offerte aux toulois d'apprendre l'arabe était... dans une mosquée. Et figurez vous que moi, oui, moi, athée résolu, je me suis contraint à assister à des cours d'arabe entre deux prêches de l'imam local. Inutile de vous dire que je n'y suis pas resté longtemps, tant cela me pesait, malgré ma grande ouverture d'esprit. Pourtant, quelques années plus tard, je n'ai pas du tout répugné à me rendre dans une autre mosquée du même département dans lequel je ne suis plus, à Tomblaine, dans le cadre d'une journée portes ouvertes, et nous avons tous deux, avec ma compagne, été fort bien accueillis. J'ai même eu la surprise d'y rencontrer une ancienne connaissance professionnelle en tenue traditionnelle, ce que j'ai trouvé plutôt amusant. Mais tout de même, il convient de ne pas tout mélanger. Et je me suis donc demandé pourquoi il était donc si difficile dans ce pays - et cela m'exaspère - d'apprendre en toute sérénité une langue parlée par 4 millions de français. Vous avez déjà vu, vous, des cours du soir d'arabe, dans votre localité ? Moi pas. Pas plus ici qu'ailleurs. Et donc, quelle autre explication peut-on apporter à cette insupportable absence (on me prive arbitrairement d'une possibilité de dialogue avec une partie significative et importante de notre monde terrestre) si ce n'est le racisme, la xénophobie, la haine des maghrébins, le tout sur fond d'inconscient collectif et de haine mémorielle liée à la guerre d'Algérie, pour seul exemple qui relève d'un réel tabou à briser ?
Et force m'est de constater que dans les propos de cette Laura Miller dont j'ai lu attentivement la prose ampoulée et bien peu ragoutante pour le gauchiste libertaire que je suis, je retrouve cette répulsion qui se camoufle sous les oripeaux de la République en employant des arguments qui plus est nationalistes (« Une nation est une âme, un principe spirituel » forgé par une histoire partagée".... belle connerie que voilà) et patriotiques qui me désolent à plus d'un titre. Sa tribune ne saurait résister bien longtemps à une analyse rationnelle du véritable problème qu'est le prosélytisme religieux, et de ses potentielles ramifications éventuellement terroristes, qui je le répète, persiste et signe, n'ont pas été relevées par le rapport pré-cité (qui se conclut par « Aucun document récent ne démontre la volonté [...] d'établir un État islamique en France ou d'y faire appliquer la charia »).
La tribune de cette soi-disant républicaine mais qui n'est qu'une vulgaire républicaniste à la sauce trumpiste se situe donc à mon sens dans ce répugnant racisme d'atmosphère dans lequel nous devons tenter de surnager à présent, à notre plus grand regret. Cela ne va vraiment pas dans le bon sens. Suivez mon regard...
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