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En lisant cet article, tout d'abord, j'ai souris, en me disant à part moi (comme bien d'autres je suppose), "ce type est complètement zinzin". La loi, qui est une construction sociale collective, quand bien même certains n'y auraient pas participé, s’applique à tous, qu'on le veuille ou non. L'Etat a le monopole de la force, comme de la violence, chaque anarchiste et antifasciste le sait bien, qui l'apprend bien souvent à ses dépends de manière purement empirique, loin des grands discours, en se retrouvant face à une armée de CRS blindés, surprotégés et sur-armés face à quelques manifestants. Et voila donc ce Monsieur, malgré son système de pensée, bien forcé de s'y confronter, et d'abdiquer, quelle que soit la qualité et la pertinence de ses arguments. Le citoyen, fut-il "souverain", seul contre tous, n'est pas roi. Face à lui se trouve l'expression incarnée d'une volonté collective : les forces de l'ordre, théoriquement sensées faire appliquer "la Loi".
De plus puissants que lui s'y sont essayés, qui voulaient continuer par exemple à escroquer en toute impunité le parlement européen. Ielles s'y sont cassé les dents. Et c'est justice. Je me dis d'ailleurs en écrivant qu'il n'y a finalement pas grande différence entre ce citoyen qui se dit souverain, et tous ceux qui se sont émus de la gravité de la sentence du tribunal collégial, au point de se sentir autorisés à menacer les juges qui ont instruit l'affaire du RN.
Mais revenons à notre exemple ubuesque amusant qui faisait déjà l'objet d'une attention médiatique toute particulière à l'occasion d'une vidéo qui a beaucoup circulé sur les réseaux. Elise Lucet a d'ailleurs réalisé un reportage à sa sauce sur les membres de cette étrange secte, où l'on voit le fameux cow-boy en action. Que nous dit-il, à son procès ?
Le verbe "se soumettre", en particulier, donne de l'urticaire au quinquagénaire qui dit être sans activité depuis un an. "Ce n'est pas parce qu'on a un uniforme qu'on peut demander à quelqu'un de se soumettre", assène-t-il.
Sur ce point là, si l'on est un bon libertaire qui se respecte, on pourrait être d'accord. Mais pour ma part, je suis plutôt du genre d'anarchiste qu'évoque Brassens en disant qu'il préférait marcher dans les clous pour ne pas avoir de compte à rendre à la maréchaussée. [ Cette attitude respectueuse m'a d'ailleurs permis d'infiltrer en toute tranquillité des groupes de police en épiant leurs conversations au talkie-wakie afin de renseigner éventuellement mes petits camarades sur leurs intentions, lors d'une manif partie en sauvage... Ceux qui savent pour l'avoir vécu me comprendront. ]
Plus sérieusement, cela pose la question de la "soumission" de tout un(e) chacun(e) à la loi. Elle part en effet d'une compréhension et d'une acceptation volontaire relatives à un contrat social librement consenti. Or, force m'est de constater que les juges sont de plus en plus contestés et menacés. Et cela me ramène à nouveau au contexte actuel. Le moment ne serait-il pas venu de refonder notre société autour de bases claires, et de lois acceptables par une majorité, qui soient adaptées à notre époque actuelle ? Et je repense alors au projet utopique des zinzinsoumis... La fameuse VIème république. N'auraient-ils pas eux aussi de nombreux points communs avec les citoyens souverains, qui refusent de se soumettre à des lois qu'ils n'ont pas eux même "contractées" ?
Décidément, malgré les apparences, si l'on dépasse le côté risible du discours de Pierre Legrand, voilà une attitude à priori ridicule qui soulève pourtant bien des questions fondamentales, nonobstant la teneur idéologique immonde des citoyens dits souverains, dont la fiche wiki précise notamment ceci :
" Tristan Mendès-France indique que le mouvement trouve son origine « au sein de la mouvance survivaliste d’extrême droite américaine dans les années 70 »[14]. En Allemagne, la tentative de coup d'État de 2022 a conduit à l'arrestation de plus d’une cinquantaine de militants d’extrême droite, tous membres des Reichsbürger[14]. "
Laissera-t-on à l'avenir, comme le souhaitent ceux qui récusent les dispositions législatives qui ont abouti à l'inéligibilité de Marine Le Pen, la seule extrême-droite et ses satellites écrire la loi ? Le futur danger est bien là, quand on prend en considération les différents ingrédients de la situation politique actuelle. Le refus de Macron de nommer un premier ministre issu de la liste politique qui a gagné les dernières élections législatives (dont on ne se rappelle déjà plus du nom, tant il a été effacé par l'action et la présence de la droite de gouvernement alliée de circonstance à l'extrême-droite), a conduit à un sentiment d'inutilité du vote, que l'on peut donc nier quand il n'arrange pas les pouvoirs en place. Le risque d'une importante abstention est donc suffisamment grand pour devenir préoccupant, même pour un libertaire pour qui la grand messe électorale n'est pas l'alpha et l'oméga de l'action politique.
Pourtant, les lois qui viendront de la majorité présidentielle, qu'on le veuille ou non, s’appliqueront à tous. Et donc, veut-on vraiment d'une loi basée sur l'inégalité des citoyens devant la loi ? Je demande, juste ;)
Réflexion à poursuivre...